Obligation de tri à la source des biodéchets : comment se mettre en conformité ?

Interview de Jean-François Miellet, Directeur commerce et valorisation d’Ecovalim et René Martinez, Président du SITOM Sud Rhône  

Dans trois mois, le tri des biodéchets devient obligatoire pour tous, particuliers inclus. Pourquoi cette mesure ? Quels en sont les enjeux et les conséquences ? Comment se conformer à une telle obligation ? Découvrez le décryptage de cette réglementation verte par Jean-François Miellet, Directeur commerce et valorisation d’Ecovalim et le retour d’expériences de notre client le SITOM Sud Rhône.  

Tout ce qu’il faut savoir sur l’obligation de trier ses biodéchets au 1er janvier 2024

La loi anti-gaspillage pour une économie circulaire (AGEC) du 10 février 2020 est la charpente législative qui encadre cette obligation de tri à la source. Elle cible toutes les strates de la société : des collectivités aux entreprises, en passant par les particuliers. L’enjeu est de réduire significativement notre impact environnemental grâce à la valorisation des déchets.

 

Plus du tiers des ordures ménagères résiduelles en France sont des déchets putrescibles qui pourraient faire l’objet d’une valorisation organique, estimés à 10Mt/an. C’est autant de matière organique qui échappe au cycle vertueux du retour à la terre permis par le compostage de proximité ou la méthanisation.  

Quels sont les enjeux et conséquences de la loi AGEC pour les collectivités locales ? 

Les collectivités territoriales doivent proposer aux habitants des solutions pour trier à la source leurs biodéchets à partir de début janvier 2024. Cela peut se faire par la mise à disposition de composteurs avec l’aide à l’achat, l’organisation d’une collecte supplémentaire ou la mise en place de bornes d’apport volontaire. Alors que l’échéance réglementaire approche, force est de constater que le sujet suscite l’inquiétude parmi de nombreuses collectivités, qui peinent à mettre en place des solutions pour valoriser les déchets organiques de leur territoire. 

 

30% seulement des Français seront en mesure de trier leurs biodéchets début 2024. 

  • Le tri à la source des biodéchets n’équipe aujourd’hui qu’entre 16 et 17 millions d’habitants.
  • Sur ce nombre, 5 millions d’habitants sont concernés par une collecte séparée ;
  • 10 millions par du compostage individuels 
  • 1,5 million par du compostage partagé.  
  • En incluant les collectivités qui viennent de s’engager dans la démarche, près de 20 millions de Français seront bientôt en mesure de trier 

Source Gazette des Communes

 

 

La mise en place de cette loi est progressive. À l’échelle nationale, on observe des initiatives variées : création de composteurs collectifs, collecte pour valoriser les biodéchets par voie de méthanisation.

« Ce qui me semble essentiel pour une collectivité, c’est de se lancer dans la démarche avec une étude de faisabilité ou le déploiement d’un pilote pour évaluer les difficultés et les freins à lever pour réussir cette transition. A l’instar de ce que nous avons fait avec le SITOM Sud Rhône » explique Jean-François Miellet 

Retour d’expérience de la démarche initiée par le SITOM Sud Rhône en partenariat avec Ecovalim

Le Syndicat Intercommunal de Traitement des Ordures Ménagères (SITOM) Sud Rhône, créé en 1987, collecte, transfère, transporte des déchets recyclables et non recyclables, valorise les premiers et traite les seconds. Le SITOM Sud Rhône gère les déchets de 3 communautés de communes et 23 communes, ce qui représente 90 000 habitants.

Depuis 2021, le SITOM Sud rhône en collaboration avec Ecovalim déploie une solution de collecte des biodéchets dans les centres-villes de ce territoire et de valorisation par voie de méthanisation.

« Notre pilote est en cours ; il a été déployé en 3 phases avec l’accompagnement d’une équipe dédiée d’Ecovalim. Nous avons commencé avec 9 communes (Saint Symphorien d’Ozon, Ternay, Communay, Chaponnay, Brignais, Chaponost, Millery, Mornant, Taluyers) qui ont bénéficié de l’installation de 13 bornes en 2021. En une année, nous avons collecté 30 tonnes. Puis en 2023, 8 nouvelles communes ont été intégrées au dispositif avec 15 nouvelles bornes mises à disposition. L’année prochaine, nous densifierons le parc de bornes sur les communes déjà dotées avec 15 bornes supplémentaires. » explique ainsi René Martinez.

Le SITOM Sud Rhône est ainsi au cœur de la mise en œuvre de la loi anti-gaspillage pour les collectivités dont il gère la gestion des déchets. « L’hétérogénéité du territoire couvert par le syndicat, entre zones rurales et urbaines, nous a posé des défis logistiques et éducatifs » précise encore René Martinez. « Tous les foyers ne sont pas éligibles au même type de dispositif pour valoriser leurs biodéchets. »  

Les foyers, qui sont en centre-ville avec un petit espace vert (< 50 m²) ou sans, ont l’obligation d’apporter leurs biodéchets à la borne mise à leur disposition. Une borne peut accueillir les biodéchets de 40 foyers.

« L’accompagnement d’Ecovalim avec sa solution de collecte et valorisation par voie de méthanisation nous a été précieux. Nous avons ainsi opté pour la mise en place d’un système de badge, pour permettre un tri de grande qualité sans refus. Cela nous garantit la qualité du tri des biodéchets et une bonne gestion de la borne pour absorber le volume hebdomadaire des biodéchets produis par les 40 foyers rattachés à ce point d’apport volontaire. » précise René Martinez.  

La solution proposée par Ecovalim prévoit la fourniture de bacs étanches pour éviter d’avoir des fuites de biodéchets ; ces derniers sont collectés et les bacs nettoyés de façon hebdomadaire par Ecovalim, qui les transforme en soupe avant de les transporter pour être valorisés dans une unité de méthanisation partenaire

L’importance de la sensibilisation et des campagnes d’information

Pour René Martinez, Président du SITOM Sud Rhône, il a été très utile de lancer la démarche par un pilote pour tester le dispositif. Cela a aussi permis d’identifier les actions d’information et de sensibilisation qui sont les plus efficaces pour susciter l’adhésion des habitants à ce nouveau geste de tri. Et d’ajuster si besoin les actions de communication (réalisation d’une vidéo pédagogique, flyers, articles dans le bulletin municipal, …).

« Nous avons organisé un forum d’information avec Ecovalim et travaillons en étroite collaboration avec les communes concernées. On utilise les canaux de communication déjà existants comme les bulletins municipaux, les sites internet pour sensibiliser les habitants et faire des piqûres de rappel régulières. Les gens de façon générale sont inquiets de l’application prochaine de cette loi et souhaitent contribuer à la mise en conformité. » précise René Martinez.

Le principal frein pour donner envie aux citoyens d’adopter ce nouveau geste de tri est la réticence qu’ils peuvent avoir à manipuler des déchets considérés comme sales et humides. Il est donc essentiel que les bacs d’apport volontaire soient bien entretenus, vidés régulièrement et étanches pour éviter que la matière organique ne coule. L’utilisation de badge permet de gérer au mieux le volume des déchets apportés et de s’assurer que le bac ne déborde pas. Par ailleurs, cela responsabilise les habitants, qui trient de façon consciencieuse. Les déchets collectés par Ecovalim dans les communes gérées par le SITOM sont de grande qualité.  

Enfin, pour assurer l’efficacité du système, il est essentiel de mettre en place des outils de suivi et d’évaluation. Cela permet d’ajuster la stratégie en fonction des besoins et des retours des habitants. 

En conclusion, si l’investissement initial d’implémentation peut freiner, les aides couvrent en partie le coût d’investissement. Le tri à la source contribue  à une meilleure qualité de vie par la réduction des tonnes d’ordures ménagères incinérées, la production de compost ou de biométhane par méthanisation. La réduction de la pollution des sols et des nappes phréatiques, la limitation des émissions de gaz à effet de serre et une prise de conscience collective des enjeux environnementaux en sont les piliers. À long terme, les collectivités deviennent vertueuses.